Monsieur Koch, vous travaillez au contact des personnes âgées depuis de nombreuses années. Comment les comportements ont-ils évolué en rapport avec la boisson ?
On boit beaucoup moins d’alcool aujourd’hui. À lui seul l’abaissement de la limite autorisée au volant en Suisse a certainement contribué à cette évolution. Par ailleurs, un mode de vie sain est dans l’air du temps actuellement. On recherche sans cesse de nouvelles possibilités, de nouveaux produits, de nouvelles inventions créatives pour vivre plus sainement. Tout naturellement, le choix de boissons sans alcool s’élargit et les variations créatives sont de plus en plus demandées.
Qu’est-ce qui vous a particulièrement plu dans le séminaire « Le sommelier suisse de l’eau » ?
De manière générale, l’incroyable diversité que cache le thème de l’eau minérale. Il y a une multitude d’aspects. De l’histoire des sources thermales à la définition même de l’eau minérale, en passant par les spécificités géologiques de telle ou telle eau minérale. La visite de l’entreprise Goba AG à Gontenbad (Eau minérale Appenzeller et p. ex. Flauder). Nous avons pu voir et découvrir des tas de choses.
Comment se présente une source ? Comment y accéder ? Où chercher un captage dans le sol ? Qu’est-ce qui caractérise une installation souterraine ? Comment fonctionnent les conduites ? C’était spectaculaire. Surtout lorsqu’on a une telle bouteille d’eau minérale devant soi et qu’on sait le chemin qu’a parcouru cette eau avant d’atterrir dans la bouteille. Le plus fascinant pour moi a cependant été le thème de l’analyse sensorielle : embrasser l’eau par tous les sens.
L’eau m’a toujours fasciné. Aujourd’hui, je sais qu’on peut développer le thème de manière créative, en particulier dans la restauration.
Werner Koch, gérontologue diplômé, spécialiste en marketing et sommelier de l’eau
Comment se présente la chose ?
Sans surprise – vu que c’est ce que tout le monde se représente à l’évocation du job de sommelier de l’eau –, l’exercice tourne avant tout autour de la question du goût. Mais nous avons aussi appris l’analyse visuelle, olfactive et sonore. Que se passe-t-il avec l’eau minérale quand on la regarde de près ? Comment se reflète-t-elle contre la paroi du verre ? Agite-t-elle la surface de l’eau dans le verre ou se présente-t-elle lisse comme un miroir ? Les eaux minérales n’ont pas toute la même odeur. Par exemple, elle peut sentir l’ardoise, la terre ou le sel. À l’oreille aussi, on note des différences dans le pétillement du gaz carbonique.
Le plus fascinant pour moi a cependant été le thème de l’analyse sensorielle : embrasser l’eau par tous les sens.
Werner Koch, gérontologue diplômé, spécialiste en marketing et sommelier de l’eau
Et au palais, à quoi doit-on veiller particulièrement ?
On apprend à reconnaître les quatre goûts de base que sont le sucré, l’acidité, le salé et l’amertume dans une gorgée d’eau. Pour cela, il faut connaître les zones les plus sensibles aux différents goûts sur la langue. Le sucré à la pointe de la langue, l’amertume plutôt à l’arrière sur le dessus de la langue, le salé et l’acidité sur les côtés. Si l’on garde ensuite en bouche différentes eaux, on peut se passer en tête une grille de référence, avec notamment aussi la différenciation entre le goût à l’attaque, après 10 à 15 secondes et au moment d’avaler, ainsi que la sensation générale en bouche.
Le domaine de l’analyse sensorielle (ou organoleptique) convoque tous les sens.
Une sensation de velours sur la langue peut être l’expression d’une haute teneur en calcium.
Une eau minérale gazeuse s’accorde parfaitement avec le vin blanc.
Si un rouge n’a pas le même goût au restaurant qu’à la maison, cela peut tenir à l’eau minérale qui l’accompagne.
Un volet important du séminaire portait sur le « pairing ». Vous pouvez développer quelque peu ?
Au fond, il s’agit de déterminer quelle boisson convient à quel plat et pourquoi. Nous avons eu l’occasion de déguster des choses les plus diverses dans ce contexte. Un point qui m’a fasciné était la question de l’accompagnement sans alcool qu’il convient de proposer sur un plat de fromage. Saviez-vous que le jus de pomme chaud ou le jus de poire se marie extraordinairement bien à ce plat ? C’est une expérience gustative totalement nouvelle. Idem pour un schorle à la pomme sur un rôti de porc. L’acidité des pommes équilibre le gras de la viande ou de la sauce. Nous avons aussi testé un appariement avec la mousse au chocolat. Le goût de la mousse change complètement si on l’accompagne d’un porto, d’un expresso ou d’un jus de raisin. C’était extrêmement intéressant.
Werner Koch a toujours nourri une fascination particulière pour le thème de l’eau. Il est aujourd’hui sommelier de l’eau diplômé et sait bien que l’eau minérale suscite la curiosité.
Comment réagit votre entourage au titre de « sommelier de l’eau » ?
Au début, c’est surtout l’incrédulité. On me demandait souvent : « Mais qu’est-ce que c’est que ce truc ? » Mais dès que j’explique la démarche, la plupart des gens trouvent cela passionnant. Surtout lorsque je déguste quelque chose avec eux.
Pensez-vous que la reconnaissance et l’image du sommelier de l’eau vont monter à l’avenir ?
Je pense que l’accompagnement d’un repas avec une boisson sans alcool gagne sans cesse en importance. Avec la vague positive des modes de vie sains, les personnes qui ne boivent pas d’alcool sont de plus en plus nombreuses dans notre société, et elles n’ont aujourd’hui pas encore un large choix. Je pense que ce segment présente un gros potentiel.